A la découverte du pistage dans la neige
Rendez-vous avec la photographe naturaliste et spécialiste du pistage animal Sandra Bérénice Michel. La montagne est couverte de neige, il est temps de jouer les détectives.
Rendez-vous avec la photographe naturaliste et spécialiste du pistage animal Sandra Bérénice Michel. La montagne est couverte de neige, il est temps de jouer les détectives.
Une neige précieuse
Reconnaitre les traces d'animaux dans la neige peut parfois se rapprocher d'une enquête. Mais pour cela, il faut que la neige tombe suffisamment. La neige est de plus en plus rare et précieuse. Si vous aimez le froid et que vous voulez lutter contre le changement climatique, vous pouvez arrêter de prendre l'avion, manger moins de viande et vivre et consommer local le plus possible.
Jeu de piste
Dans cette station de Savoie, la neige tombe en altitude, je pars donc rejoindre la photographe et pisteuse Sandra Bérénice Michel pour une initiation au pistage. Elle est déjà en train d'examiner une piste. "Déjà au bord de la route il y a des empreintes. Mais la neige nous dit qu'il faut rester modeste. Le manteau blanc est tellement épais qu'on a du mal à reconnaitre ces empreintes. On ne voit plus qu'un creux et la distance entre les pas. Cela pourrait un renard, un chien ou même un blaireau ... Mystère."
Nous nous préparons à continuer à grimper. Avant cela, Sandra explique la règle d'or du pistage : rester sur les sentiers. "Quand on commence le pistage animalier, le mieux c'est de rester sur les chemins, surtout l'hiver, pour deux raisons. La première c'est que la faune a besoin de rester en quiétude l'hiver. Les chutes de neige fatiguent beaucoup les animaux. Ils sont habitués à voir des humains sur les chemins, mais pas ailleurs. Cela les épuiserait de fuir dans la neige épaisse face à une menace inhabituelle. La deuxième raison est stratégique. Poursuit la pisteuse. En passant par les chemins, on coupe des voix. Les animaux empruntent ou découpent les chemins. Ca va nous permettre de voir le plus de pistes possible." Rester sur les sentiers permet donc de voir le plus d'empreintes sans déranger les animaux.
Nous continuons à grimper. Assez vite, trois pistes se détachent sur la neige. Elles sont fortement recouvertes par la neige. On ne distingue plus que des formes vagues et arrondies. Les impressionnants talents de pistages de Sandra rentrent alors en jeu. "Cette première piste mystérieuse pourrait être celle d'un renard. Les dimensions des empreintes correspondent. En plus, l'allure de la piste indique qu'il trotte légèrement comme le ferait ce petit canidé. "L'autre piste est plus simple à reconnaitre avec cette vague forme de Y, c'est le lièvre. On ne peut pas savoir si c'est le lièvre brun ou le lièvre variable, car les deux cohabitent à cette altitude. Au milieu, on voit bien des grosses pattes qui filent tout droit. Enthousiaste, Sandra marque une pause. On n'a pas de difficulté à imaginer que c'est un grand canidé. La ligne bien droite fait clairement penser à un chien ou un loup. Mais le chien aurait les pattes légèrement écartées. Cette piste est très droite, je pense donc qu'un loup est passé ici."
Après 30 mètres sur la route, nous avons observé les pistes de trois espèces, dont le loup !
Nous poursuivons l'ascension, il est temps de se faire discret à l'approche de la zone forestière. Nous espérons trouver des traces plus fraiches et plus faciles à reconnaitre.
Comment reconnaitre les traces des ongulés ?
Après avoir observé des traces subliminales, nous trouvons enfin des pistes fraiches de chevreuil et de chamois. Découvrons aussi comment identifier les traces des autres animaux qui marchent sur leurs sabots.
- Le chevreuil : ses empreintes sont petites et resserrées. Les petits sabots arrondis font 3 cm de long.
- Le chamois : ses sabots sont en formes de poires avec les deux moitiés écartées. Les empreintes sont un peu plus longues avec 3 à 4 cm.
- Le sanglier : en plus des deux gros sabots, on observe deux ongles à l'arrière. L'empreinte fait 6 à 8 cm de long.
- La biche : les sabots sont larges et arrondis. L'empreinte fait environ 4 à 5 cm de long.
- Le cerf : les sabots sont similaires à ceux de la biche en plus grands. L'empreinte mesure 6 à 7 cm de long.
Tempête en altitude
Nous avons maintenant une belle vue sur le massif. C'est un peu la vallée des loups de Sandra. "Ca fait sept ans que je les suis sur ce territoire des Alpes du nord." En continuant l'ascension, le ciel est de plus en plus blanc et le vent se lève. Puis, c'est la tempête. La neige tombe fort. En bonne montagnarde, Sandra est ravie "C'est génial !" J'observe alors une dernière trace un peu particulière, des ronds isolés. Ce sont en fait des amis de neiges qui tombent des sapins et forment ces traces.
Finalement, le froid et l'humidité ont eu raison du micro de ma caméra.
Après une petite pause pour sécher le matériel, notre expédition et le tournage peuvent reprendre.
La falaise des chamois
Pour cette deuxième partie de journée de pistage, nous voilà face à deux problèmes. D'abord, il a tellement neigé que toutes les traces sont recouvertes. Ensuite, nous ne savons pas où nous allons dormir.
Sandra et moi continuons de marcher sur ce beau massif des Alpes. Nous arrivons près d'une falaise quand Sandra, qui connait ce territoire comme sa poche m'interpelle. "Ouvre bien les yeux, ça va être magnifique." La guide de montagne m'explique que cette zone est fréquentée par les chamois. Nous nous installons alors à bonne distance pour les observer se déplacer dans la neige. "Les chamois ont bien descendu, ils sont là pour manger" m'explique Sandra. On les voit gratter la neige avec leurs sabots pour grignoter quelques pousses d'herbe. L'hiver est rude pour ces animaux. Ils nous imposent le respect par leur résilience.
La nuit commence à tomber pendant que nous observons les chamois. Nous partons alors. Sandra m'a réservé une surprise. Un ami berger lui a prêté son chalet d'alpage pour que nous puissions y passer la nuit, quel luxe !
Depuis cet endroit, on voit les lumières tout en bas, dans la vallée. Avant d'aller dormir, et faute d'avoir vu des traces, Sandra me donne une petite introduction au pistage des carnivores.
Comment reconnaître les traces des carnivores ?
Découvrons d'abord les empreintes avec quatre pelotes digitales et une plantaire.
- Le loup : la plantaire est triangulaire et la pelote en bas à gauche est plus basse. C'est une grosse empreinte qui mesure 7 à 10 cm de long.
- Le renard : les pelotes sont plus allongées et resserrées. L'empreinte fait environ 4 à 5 5 cm de long.
- Le lynx : on n'observe pas de griffe chez les félins. L'empreinte est ronde et les pelotes sont décalées. Elle mesure 6 cm.
- Le chat sauvage : l'empreinte ressemble à une petite empreinte de lynx de 47 cm de long.
Nous nous endormons, une grosse journée nous attend demain. Rendez-vous la semaine prochaine pour la suite de nos aventures dans la Minute Nature.
5h15, il neige légèrement en cette fin de nuit. Nous avons enfilé nos combinaisons de camouflage blanches. Direction l'affût, non loin d'une piste forestière que les animaux fréquentent. Je suis Sandra et nous nous postons à l'affût sous un bel épicéa. On y voit les deux côtés des versants. D'un côté les loups passent régulièrement, de l'autre les falaises accueillent des chamois. Ce sont ces derniers que nous apercevons finalement, pendant que le soleil finit de se lever.
Le ciel se découvre, mais il fait tout à coup très froid. Il est temps de bouger. "On va monter en forêt pour espérer voir des empreintes. Encore une fois, on va bien rester sur les sentiers" me rappelle Sandra. Nous trouvons vite une trace. "C'est un micromammifère, explique la pisteuse, il fait des bons en dehors de sa galerie, on dirait qu'il tricote."
Le soleil brille maintenant, nous offrant une magnifique vue sur le Mont-Blanc. Nous continuons à grimper quand Sandra s'exclame. "Regarde l'empreinte !" Une grosse empreinte avec quatre pelotes et des griffes, la piste nous emmène vers un reste de proie. Nous suivons bien un loup. La pisteuse interprète les traces en direct. "Il a rongé un bout de chamois jusqu'à l'os, puis a marqué son territoire quelques mètres plus loin. Je pense même qu'ils sont deux. Ce sont sûrement ceux que je suis depuis un moment sur ce territoire." La surprise n'est pas finie, nous suivons la piste et celle-ci rejoint celle d'un chevreuil. "Les loups trouvent enfin une proie, et le chevreuil a fait un impressionnant bond d'un mètre."
Nous continuons notre randonnée, quand nous découvrons une nouvelle empreinte, celle du lièvre. Sandra nous explique comment savoir dans quel sens avance le lagomorphe.
Comment reconnaître les traces de lièvre ?
Les traces de lièvre forme une trace en forme de Y avec deux traces à l'avant côte à côte et deux à l'arrière sur le même axe.
Mais comment savoir dans quel sens avance un lièvre ? Chez cet animal qui se déplace en bondissant, ce sont en fait les pattes arrière qui se retrouvent à l'avant de la trace, et les pattes avant restent à l'arrière.
Sandra - Atmosphères sauvages
Sandra Bérénice Michel est pisteuse, guide en montagne, photographe et vidéaste naturaliste. Installée dans les Alpes, elle a notamment suivi une meute de loups sur son territoire.
Découvrez le travail de Sandra sur son site, sa chaine YouTube et sa page Instagram.
Le guide nature traces et indices
Ne partez pas en session de pistage sans notre guide nature !
Conçu pour tenir dans la poche par des naturalistes expérimentés, le Guide nature traces et indices donne au lecteur le savoir-faire d’un détective. Que ce soit en forêt, en bord de mer ou sur une rive boueuse, décryptez les empreintes, les pistes ou les indices qu’animaux ou plantes laissent derrière eux.
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