A la recherche du nid de Milou
Partez sur les traces de Milou, le milan noir géolocalisé. Reportage dans la campagne fribourgeoise en compagnie d'Adrian Aebischer, ornithologue confirmé.
Partez sur les traces de Milou, le milan noir géolocalisé. Reportage dans la campagne fribourgeoise en compagnie d'Adrian Aebischer, ornithologue confirmé.
12 avril 2017, aux abords de Châtel-Saint-Denis.
En ce beau jour de printemps, ça chante de partout. Un petit groupe de chardonnerets élégants pépient en chœur en voletant dans un bosquet. Plus haut, un pigeon traverse le ciel bleu en roucoulant. Au loin, c’est un pic épeiche que l’on entend tambouriner. Mais ce que l’on est venu chercher aujourd’hui, c’est un milan noir femelle du nom de Milou. A cette saison, elle devrait commencer à couver ses œufs. Notre objectif est donc de localiser son nid et peut-être repartir avec quelques photos de la star du jour.
Depuis son retour de migration le 27 mars dernier, les données GPS de sa balise indiquent que Milou passe beaucoup de temps dans un petit bois de la campagne fribourgeoise. Située aux abords de la commune de Châtel-Saint-Denis, la petite forêt est entourée de prairies verdoyantes. Un vrai petit coin de paradis ! «Grâce à sa balise, nous savons que Milou doit être dans les alentours, indique Adrian Aebischer, ornithologue chevronné qui suit attentivement le parcours du milan. Mais si plusieurs localisations GPS sont enregistrées quotidiennement dans la balise, elles ne nous sont transmises qu’une fois tous les cinq jours, pour une question de gain d’énergie.» Impossible donc de savoir où est Milou à ce moment précis.
Retour aux sources
Notre milan noir n’en est pas à sa première saison de nidification. «Milou avait déjà utilisé un nid dans cette forêt l’an passé, se souvient Adrian. Elle avait eu au moins un jeune.» Les deux années précédentes, son nid était situé un peu plus au nord, proche du lac de Lussy. Mais par deux fois, la nidification avait échoué et aucun petit n’avait été observé. Qu’en sera-t-il pour 2017 ?
Postés à quelques mètres du petit bois, nous observons d’abord les airs. Trois milans noirs et deux milans royaux tournoient au-dessus de nous. Ces rapaces peuvent se rapprocher les uns des autres, lorsqu’ils croient que de la nourriture est à proximité. Ils voient jusqu’à 5 kilomètres à la ronde, donc ils peuvent venir de loin. Derrière ses jumelles, Adrian déclare : «je ne vois pas de balises, ce n’est pas Milou.» Soudain, un milan noir descend en piquet dans le bois. «Il doit y avoir un nid !, s’exclame-t-il. Ces oiseaux laissent rarement un nid sans surveillance. Ils pourraient se le faire piquer par un milan royal ou une buse variable.»
Nous partons donc à la recherche du nid. Dans la forêt, Adrian scrute minutieusement tous les arbres. Les nids de milan se trouvent généralement à plus de 25 mètres de haut, souvent dans des conifères, bien à l’abri des regards cachés derrières les aiguilles. Autour de nous, c’est un concert, grive musicienne, pouillot véloce, rouge-gorge et accenteur mouchet donnent de la voix. Mais toujours pas de trace de Milou.
Fidélité au nid
Tout à coup, un milan noir vient se poser sur le sommet d’un épicéa à quelques mètres de nous. «Il n’est pas farouche ! Même s’il est impossible de différencier mâle et femelle à vue, je dirais que ce doit être un mâle qui surveille les alentours du nid», explique l’expert. Serait-ce le compagnon de Milou ? «Les couples de milans noirs ne sont pas fidèles l’un envers l’autre, mais plutôt envers leur nid. Mâles et femelles migrent chacun de leur côté et s’ils reviennent vers leur ancien nid l’année suivante, alors peut-être que le couple se reformera.»
La recherche se poursuit. Les arbres sont passés en revue sous tous les angles. «Là, des fientes au sol ! , s’exclame Adrian. C’est une première preuve qu’il y a un nid occupé.» En levant la tête, on aperçoit également un morceau de plastique qui repose sur une branche. Il doit vraisemblablement être tombé du nid. Pour une raison encore inconnue, les milans collectent ce genre d’objet pour en garnir leur nid. Ca y est, nous avons trouvé le nid !
Aux jumelles, Adrian arrive à discerner une branche verte sur le dessus de la construction. Elle recouvre d’anciennes branches sèches qui doivent dater de l’an passé. «C’est le nid que Milou avait utilisé l'année dernière. Il a été rechargé, c’est une preuve de plus que le nid a été utilisé récemment.» Pour l’heure, difficile de savoir s’il est occupé. Quand les femelles couvent, elles sont parfois bien enfoncées au fond du nid et presque rien ne dépasse. Comme rien n’a l’air de bouger, nous nous éloignons.
Finalement, Milou reste introuvable. Après inspection des données GPS du jour, il s’est avéré que nous avions vu juste. Au moment où nous la cherchions au nid, Milou était en vadrouille dans la campagne fribourgeoise. Preuve qu’elle n’a pas encore pondu d’œufs. Mais chaque soir, elle revient passer la nuit dans ce paisible petit bois. Affaire à suivre.
Retrouvez la position actuelle de Milou avec notre article.
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