© Benoît Renevey

De la biodiversité dans des paysages agricoles

Entre le Jura vaudois et le lac de Neuchâtel, biodiversité et paysages agricoles cohabitent en harmonie. Suivons les contours des haies et des jachères, réseau de vie pour les animaux.

Entre le Jura vaudois et le lac de Neuchâtel, biodiversité et paysages agricoles cohabitent en harmonie. Suivons les contours des haies et des jachères, réseau de vie pour les animaux.

Marion Tanner, bio­logiste
En compagnie de Marion Tanner, bio­logiste au réseau écologique de l’Arnon / © Escapade Vugelles-Fiez; Marion Tanner

Les rues sont encore silencieuses dans le village de Vugelles. Je retrouve Marion Tanner près du temple. Depuis une dizaine d’années, cette biologiste s’occupe du réseau écologique de l’Arnon qui regroupe plusieurs communes alentour. « Le but du projet, c’est de créer des zones favorables aux animaux et aux plantes sauvages au cœur des étendues agricoles. » Impatients de découvrir ce que nous réservent les premières heures de cette matinée estivale, nous nous mettons en chemin.

Vue sur le lac de Neuchâtel
Vue sur le lac de Neuchâtel / © Benoît Renevey

Sauvés par la pente

Entre ce hameau et le suivant, la petite route de campagne est bordée par des terrains escarpés. « Les coteaux pentus du pied du Jura sont peu adaptés à l’agriculture intensive, ils ont donc conservé une bonne partie de leurs richesses », se réjouit Marion. Ici, prairies fleuries, bosquets champêtres, vieux murs et tas de pierres grouillent de vie. A notre approche, un lézard des murailles se dissimule derrière une touffe d’orpin jaune. « Dans ce secteur, notre travail consiste avant tout à maintenir l’existant, explique la biologiste. Sur ce terrain, par exemple, l’agriculteur a planté des arbres fruitiers haute-tige pour remplacer ceux qui meurent de vieillesse. » Une pie-grièche écorcheur pousse un cri d’alarme dans un roncier. Les buissons et hautes herbes à proximité regorgent de sauterelles, criquets et autres grillons, des mets de choix pour ses oisillons.

A l’abri de la grande faucheuse

Invisible dans le ciel bleu, une alouette des champs égrène sans relâche ses notes mélodieuses. A la sortie du bourg de Novalles, le paysage s’ouvre. « Ici, les parcelles sont plus productives et étendues, les agriculteurs n’ont pas envie de les morceler. C’est souvent difficile d’y intégrer des haies ou des cordons boisés », relève Marion. Heureusement, une magnifique jachère florale pourvue de quelques noyers s’étale entre les cultures. De quoi offrir un refuge à l’alouette et au tarier pâtre qui pourront y élever leurs jeunes sans craindre le passage de la faucheuse. Cet îlot de verdure est aussi un relais salutaire pour les animaux qui voudraient se déplacer d’une zone plus naturelle à une autre. « L’une des belles réalisations sur le réseau de l’Arnon, c’est l’implantation d’un ensemble de petites jachères comme celle-ci dans un secteur intensif », se félicite Marion.

Le chant de l’eau

Faux à la main, une habitante du coin entretient la bande herbeuse au bord d’un plan d’eau. « Pour l’observatoire, passez par là ! », nous lance-t-elle, joviale. Marion s’engage sur le chemin d’approche, attentive. « La réserve naturelle de l’étang de la Scie est toute petite, mais précieuse pour les espèces aquatiques et celles liées au paysage agricole. » Aujourd’hui, le rire des grenouilles vertes se mêle aux gazouillis d’une rousserolle cachée dans la végétation. Quelques hirondelles rustiques étanchent leur soif en plein vol, ignorant les manœuvres acrobatiques de grandes libellules en chasse au-dessus de la roselière.

Un ruisseau glougloute le long de la route. « Il y a peu, c’était un triste canal rectiligne », se souvient la biologiste. Depuis, il a été élargi, une renaturation aux avantages multiples. Avec un lit plus spacieux, l’eau est moins concentrée, ce qui évite de fâcheuses inondations au village de Fiez, en aval. Et bien sûr, la faune et la flore se sont empressées de coloniser ce nouveau milieu. Des fleurs variées le décorent de délicates touches colorées. Sur la berge opposée, une allée d’arbres fruitiers a récemment été plantée.

Graines d’avenir

Coquelicots et bleuets
Coquelicots et bleuets / © Benoît Renevey

Des étendues fleuries parsèment le coteau. Quelques gracieux papillons au costume noir et blanc, des
demi-deuils, virevoltent au-dessus des graminées pour y pondre leurs œufs. Ces pâturages extensifs étaient autrefois abondants sur les pentes du Jura, mais ils se raréfient. Heureusement, l’équipe du réseau écologique veille au grain. « Grâce à la technique de la fleur de foin, nous avons pu reconstituer de belles prairies », explique Marion. La méthode est simple : sur une terre préparée, il suffit de répandre du fourrage prélevé dans un herbage voisin, riche en espèces végétales. Les graines des plantes fauchées tombent au sol et germent, augmentant rapidement la diversité botanique. La biologiste a bon espoir que ce procédé attire de nombreux animaux liés aux prairies naturelles. « Un inventaire des papillons sera réalisé prochainement pour voir si nous avons atteint nos objectifs. »

Sur un vieux piquet de clôture, une grande sauterelle verte profite des rayons du soleil. Il reste encore beaucoup à faire pour créer un réseau écologique pleinement fonctionnel dans ce paysage. Mais, grâce aux conseils de Marion et aux efforts de paysans engagés, biodiversité et agriculture progressent sur le chemin de la cohabitation. Vous aussi, semez des fleurs sauvages pour faire de votre terrain un refuge pour la faune et la flore.

Semez des plantes messicoles dans votre jardin.

Couverture de La Salamandre n°270

Cet article est extrait de la Revue Salamandre

n° 270  Juin - Juillet 2022, article initialement paru sous le titre "Les champs des possibles"
Catégorie

Récit des balades

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