Deux chouettes amies
Au fond des bois, Nathalie Houdin a découvert une mystérieuse maison gardée par deux chouettes hulottes. Un conte d’hiver digne des frères Grimm.
Au fond des bois, Nathalie Houdin a découvert une mystérieuse maison gardée par deux chouettes hulottes. Un conte d’hiver digne des frères Grimm.
Les frimas tardent à se faire sentir en ce mois de février. Même si les flocons ont fini par tomber, ici et là quelques perce-neige défient déjà l’hiver. En forêt, le chant mélancolique des chouettes hulottes annonce la fin prochaine de la saison froide. Mais impossible de localiser ces oiseaux dans l’obscurité. Comment m’y prendre pour les observer ?
Ce matin, un cri aigu rompt le calme de la vallée enneigée. Peut-être houspillée par un geai ou des mésanges, une chouette vient de trahir sa présence tout près de mon chemin. Totalement nocturne, ce rapace passe la journée dans une cavité abritée pour se reposer. J’ai déjà fait le tour de tous les vieux arbres de la région sans trouver trace de l’oiseau. Il doit pourtant être par là. Perdue dans mes pensées, je me dirige vers une maisonnette inhabitée à cette période de l’année. L’endroit est idyllique : sapins, bouleaux et châtaigniers entourent ses murs orangés qui paraissent de massepain. Les volets ? Du chocolat noir, évidemment. Les tuiles, du pain d’épices finement découpé. Et le givre qui les saupoudre, du sucre glace. Il ne manque qu’un parfum de cannelle.
Jeannot et Margot
A l’instant où je dirige mon regard vers le toit, une tête de fantôme apparaît dans l’une des quatre cheminées en biscuit. Une hulotte ! Ma présence semble intriguer un deuxième individu qui se montre alors depuis une autre cheminée.
Comme sorti de l’imagination des frères Grimm, le couple de rapaces passe le reste de l’hiver sur place. Je les surnomme Jeannot et Margot.
Comme je n’habite pas loin, je retourne régulièrement à la maison en pain d’épices voir mes chouettes amies. Les moments passés en leur compagnie se succèdent et ne se ressemblent pas. Un jour du soleil, l’autre de la neige ou parfois de la pluie. Je les prends régulièrement en photo sans jamais m’attarder pour éviter de les déranger. Nous nous regardons parfois dans les yeux. Les leurs noirs comme la suie, les miens brillants d’émotion.
Début mars, les propriétaires reviennent passer la fin de semaine dans leur demeure de vacances. Les oiseaux, dérangés par cette présence humaine, vont-ils abandonner leur logis d’hiver ? Etonnamment, ils se contentent de surveiller d’un œil discret les personnes qui s’affairent chez elles. Quelques semaines plus tard, les humains sont de retour pour les beaux jours. Rangements, nettoyages, feux de bois. Et voilà que le soir les chouettes s’en vont avec les premières fumées.
Etrangement, les lieux me paraissent désormais comme abandonnés. Massepain, biscuits et fenêtres de sucre s’évaporent. La maison enchantée redevient de pierre et béton. Vivement les premières neiges d’automne pour reprendre le conte et rêver avec les hulottes.
Voir dans le noir
Depuis la nuit des temps, son hululement hante les insomnies de ceux qui ne la connaissent pas. La hulotte est un oiseau parfaitement adapté à la vie dans le noir. Son talent à voler et chasser de nuit tient surtout à son ouïe. Grâce à ses deux oreilles implantées de manière asymétrique, la différence des sons perçus des deux côtés lui permet de localiser ses proies. Ce rapace nocturne a une capacité de détection auditive au moins dix fois supérieure à la nôtre. Son cauchemar ? Capturer mulots et campagnols par temps de pluie, lorsque l’impact des gouttes d’eau sur le sol couvre le bruit des rongeurs marchant dans la litière.
Sérénade d’hiver
Strictement nocturne et forestière, la hulotte se montre très rarement. Pourtant, c’est le rapace nocturne le plus répandu et abondant d’Europe. Le hululement tremblant du mâle peut s’entendre toute l’année, notamment lors des froides nuits d’hiver. Ce hou-hou-hououououou sert à défendre le territoire et aussi à attirer une femelle. Une fois constitué, le couple restera fidèle jusqu’à la mort de l’un des partenaires.
Nathalie Houdin
1977 Naissance à Lyon (Rhône)
1996 CAP de photographe
2009 Devient photographe de nature indépendante
2012 Sortie de "Le bouquetin au fil des saisons", son 2ème livre en autoédition
Découvrez notre dossier entièrement consacrée à ce magnifique rapace : La chouette hulotte, aventures d’une noctambule.
Cet article est extrait de la Revue Salamandre
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