© Jean-Philippe Paul

Devenez fan de la bardane !

Sous le soleil d’août, une géante offre le nectar de ses fleurs roses et l’ombre de ses feuilles. Entre orties et compost, découvrez la bardane.

Sous le soleil d’août, une géante offre le nectar de ses fleurs roses et l’ombre de ses feuilles. Entre orties et compost, découvrez la bardane.

Quelle chaleur aujourd’hui ! Et si vous osiez couper une feuille immense de cette drôle de plante là-bas, au fond du jardin, pour en faire une ombrelle naturelle ? Une rhubarbe ensauvagée ? Pas du tout, c’est la grande bardane, une cousine du chardon et de la marguerite. Cette plante s’épanouit sur les sols riches, à l’instar de l’ortie, mais n’est plus tellement tolérée dans les jardins propres en ordre. Dommage ! Si vous épargnez sa rosette de feuilles la première année, vous aurez la chance de voir émerger un véritable gratte-ciel à insectes l’été suivant. La vigoureuse plante pourra alors atteindre deux mètres de haut et produire une profusion de petites fleurs roses globuleuses et mellifères.

Abeilles domestiques et charpentières, syrphes en tout genre, guêpes et autres papillons viennent s’y abreuver. A voir le nombre de ses courtisans ailés et vrombissants, nul doute que c’est elle, la star de la fin de l’été.

Un duel de saveurs est en train de se jouer vers la cabane du jardin. D’un côté, l’exotique et dangereusement envahissant buddléia qui trône déguisé en lilas d’été. De l’autre, l’indigène bardane, peu à son avantage avec son embonpoint et ses fleurs minuscules au milieu des orties.

Pour les abeilles, l’avantage est clairement du côté de notre rhubarbe du diable : 14 butineuses à 0. Pour les papillons comme les tabacs d’Espagne, vulcains, belles-dames et flambés, la joute parfumée est beaucoup plus serrée et difficile à départager. Pour les amaryllis, là encore, honneur à la dame aux grandes feuilles. Idem pour les syrphes. Finalement, malgré sa réputation d’irrésistible arbre à papillons, le buddléia n’égale pas la bardane pour nourrir les insectes des alentours. Qu’on se le dise !

L’hospitalité de la bardane ne s’arrête pas à ses cadeaux sucrés. Comment résister à l’ombre enveloppante de ses grandes feuilles ? En fin de matinée, une imposante couleuvre verte et jaune était lovée dans ce refuge végétal, au frais et à l’abri des rayons du soleil et des prédateurs. Quelques jours plus tard, la place était prise par un mulot sylvestre.

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© Jean-Philippe Paul

Pour l’homme aussi, la bardane est bénéfique. Presque bienveillante. Et cela, depuis des siècles. La liste de ses vertus est époustouflante. Elle a bien sûr été largement consommée par le passé, en temps de crise, pour remplacer les légumes cultivés. Tiges, côtes des feuilles, racines et fleurs : tout est bon dans la bardane. Même ses feuilles étaient fumées. Et sa racine torréfiée en substitut de café.

Ses propriétés médicinales sont encore plus vastes. Voici presque 500 ans, le roi de France Henri III aurait guéri d’une mauvaise syphilis grâce à elle. Pour compléter ce glorieux tableau, on prête à ce végétal banal des vertus cosmétiques.

En septembre, les feuilles de la bardane flétrissent en mille couleurs pendant que ses fleurs capitulent en s’ornant d’or. Des enfants s’emparent spontanément des fruits ainsi offerts à portée de main. Une bataille de projectiles collants s’improvise alors, doublée de poursuites parmi les herbes sèches. Les grandes sauterelles vertes s’envolent pour fuir ces combattants euphoriques. La bardane se meurt dans les rires d’un jardin d’enfants.

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© Jean-Philippe Paul

Amoureuse, la bardane

Arctium lappa , tel est son nom savant. En grec, c’est un ours qui saisit ou agrippe. Une allusion probable aux crochets griffus de ses fleurs, puis de ses fruits. Très populaire, cette plante de la famille des astéracées collectionne les noms populaires. Herbe aux teigneux, gratteron, oreille de géant, chou d’âne, artichaut, rhubarbe du diable ou sauvage, tabac du diable, rapace, graquias, toque, bourrier, choubourrache, péterolle… Son célèbre talent à s’accrocher à tout ce qui bouge lui vaut même le sobriquet d’amoureux. Offrir un bouquet de bardane à son partenaire doit-il suggérer qu’il serait un peu trop collant ?

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© Jean-Philippe Paul

Irrésistible

Elle se mange la bardane. De la tête au pied ! Même les boutons floraux, mais il est fastidieux d’éplucher les crochets pour en atteindre le cœur… de mini-artichaut. Avec les très jeunes feuilles, on peut faire une salade. Les tiges tendres et les pétioles se savourent crus ou cuits. Il faut juste en éplucher les parties superficielles les plus amères. On mange sa racine cuite, seule ou mélangée à d’autres légumes, en gratin ou en soupe. Elle a un goût plutôt sucré et légèrement piquant.

Découvrez d'autres plantes comestibles et surprenantes avec nos recettes sauvages.

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Les graines de bardanes sont prêtes pour le voyage. / © Jean-Philippe Paul

Inspiratrice

La bardane est à l’origine d’une invention majeure. L’incroyable adhésion des crochets de ses fruits à tout ce qui s’y frotte permet à la plante de disséminer efficacement ses graines. C’est après une partie de chasse, en débarrassant son chien de ces petites boules tenaces, que le Vaudois George de Mestral imagine le système Velcro ! Cet amoureux de la nature a alors l’idée de développer deux bandes de nylon qui s’accrochent et se détachent en un tour de main. Quelques années plus tard, son Velcro ornera les chaussures de millions de personnes et ira même sur la lune avec les astronautes de la NASA.

Une découverte illustrée dans cette vidéo.

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© Jean-Philippe Paul

Incontournable

Du Japon à l’Europe, l’inventaire des vertus médicinales de la bardane semble infini. Sa réputation diurétique et dépurative date de plusieurs siècles. Mais on la considère aussi comme antibiotique, antidiabétique et cholérétique. De nombreux médecins l’ont utilisée pour traiter les symptômes de l’arthrite aiguë, les piqûres d’insectes ou les morsures de serpents en appliquant sur les lésions des cataplasmes de feuilles fraîches. Mieux, la pulpe de racine soignerait les furoncles, eczémas, teignes, acnés, croûtes, gales de lait… On en faisait également des tisanes. Un demi-verre de jus de bardane était parfois préconisé en cas d’appendicite. Des décoctions de semences auraient même été conseillées pour traiter certains cancers et maladies digestives. Une véritable pharmacie à portée de main.

En pratique, lisez nos 3 activités à faire avec une bardane.

Découvrez les coulisses des illustrations de ce dossier.

Couverture de La Salamandre n°229

Cet article est extrait de la Revue Salamandre

n° 229  Août - Septembre 2015
Catégorie

Biodiversité

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