Retour au jardin naturel
Le retour à la terre est tendance. Marie Arnould, rédactrice en chef du magazine Les 4 saisons du jardin bio, confirme cette bonne nouvelle pour la planète.
Le retour à la terre est tendance. Marie Arnould, rédactrice en chef du magazine Les 4 saisons du jardin bio, confirme cette bonne nouvelle pour la planète.
- Acteur principal: le jardinier et la jardinière
- Seconds rôles: la grelinette, la brouette, les semis...
- Sortie: 2 mai
- Lieu de tournage: le potager, le jardin partagé, le balcon
- Genre: documentaire sociétal
Marie arnould, Les 4 saisons du jardin est une revue étiquetée bio, pourquoi ?
A sa création, en 1980, le magazine s’appelait Les 4 saisons du jardinage. Mais la ligne éditoriale s’orientait déjà vers le bio et l’écolo. Nous étions des précurseurs, en plein boum de l’arrivée des produits chimiques dans les potagers. Le journal a changé de nom au moment de sa mise en kiosque en 2007. Nous en avons profité pour ajouter l’adjectif bio au titre.
Malgré le côté clivant et exclusif de ce parti pris ?
Nous favorisons le jardinage naturel. Mais d’autres approches sont possibles, comme ces magasins coopératifs de produits en vrac d’origine locale qui refusent d’afficher le terme bio pour éviter d’exclure certains petits producteurs. Je conçois aussi la critique du bio lorsqu’il est hors saison ou implique beaucoup de transport. Ce qui compte pour nous, c’est de concevoir le potager avec des méthodes naturelles.
Bonne nouvelle, le jardinage au naturel devient presque la pensée dominante !
On ne trouve plus un magazine ou un livre de jardinage pour prôner l’usage des produits phytosanitaires. Que le bio devienne mainstream (sourires) est une victoire. Comme toute pensée qui prend de l’ampleur, elle connaît déjà ses courants alternatifs. La jeune génération s’essaye volontiers à la permaculture en intellectualisant davantage l’approche de la terre.
Qui est ce néo-jardinier ? Un bobo qui imite mamie ?
Avez-vous vu le film Le potager de mon grand-père ?
Ah non désolé...
Cette œuvre autobiographique du réalisateur Martin Esposito raconte l’histoire d’un trentenaire qui se rapproche de son grand-père endeuillé par le décès de sa femme. Pour lui redonner goût à la vie, le petit-fils demande à son aïeul de lui transmettre son savoir de jardinier. Le plus jeune vient avec ses idées de permaculture, le vieil homme avec d’anciennes semences conservées. Quand l’un préconise de ne plus arroser, l’autre le fait en cachette. Ce film est une belle histoire de partage, mais aussi de visions différentes. Il apporte un riche éclairage sur l’évolution actuelle du rapport au jardin.
Tout le monde n’a pas la chance de bénéficier d’une telle transmission de savoirs...
Nous sommes passés du jardinier nourricier cantonné à son lopin de terre, à un jardinier curieux de vivre aussi une expérience sociétale et personnelle. Entre les deux, la génération des baby-boomers a peu jardiné. Ce désintérêt a en effet entraîné une rupture de transmission du savoir-faire. Je le vois à Grenoble, dans notre verger urbain collectif: presque personne ne connaît les plantes, ni la vie du sol. Aujourd’hui, on réapprend et on réinvente le jardinage.
Il serait donc plus juste de parler d'un nouveau départ que d'un retour ?
Tout à fait! Les pratiques nouvelles et inventives diffèrent de celles du siècle dernier. Le paillage permanent des cultures, pour éviter une terre laissée à nu et l’évaporation de l’eau, appartient à notre époque. Les mentalités changent parfois lentement : les jardiniers les plus âgés restent attachés aux produits chimiques perçus comme un progrès et non un danger.
Aujourd'hui, le jardinage s'apparente-t-il plus à une quête de sens qu'à un simple passe-temps ?
Cultiver la terre est une manière enrichissante de devenir acteur de sa vie et de s’écarter du rôle de consommateur imposé par une certaine société. Cela me fait penser à la notion anglo-saxonne d’empowerment, d’autonomisation. Le jardin permet cette valorisation de soi, ce développement personnel.
Plantages réussis
Depuis 1996, le Service des parcs et domaines de la Ville de Lausanne, en Suisse, a mis en place 14 parcelles de plantages, situées dans des quartiers densément peuplés. Au total, la capitale vaudoise propose 15 000 m2 de potagers urbains, pour le bonheur d’environ 350 Lausannois.
Et ausi une forme d'ancrage à la terre, un rapport différent au temps qui passe et à la nourriture...
Effectivement. Une étude sociologique réalisée dans des jardins partagés à Marseille montre qu’à partir du moment où les gens cultivent un potager, leur rapport à l’alimentation change radicalement. La quantité de fruits et légumes consommée passe de 221 grammes par jour dans les foyers non jardiniers à 370 grammes dans les foyers qui fréquentent les jardins partagés.
Donc, le jardin, c'est aussi la santé ?
Evidemment. Alzheimer, le diabète, l’obésité, la dépression, sans parler des cancers, toutes ces maladies augmentent et risquent de faire chavirer notre système de santé. Mieux manger et s’activer davantage, ces vertus trouvent souvent leurs racines au jardin.
Cette nouvelle vision du jardinage donne de l'espoir aux herbes folles ?
Elles ont des raisons d’espérer… Les produits phytosanitaires sont interdits dans les collectivités françaises depuis janvier 2017. Ils seront aussi prohibés dans les jardins privés en 2019. Cette réglementation pousse les jardiniers à se passer de produits chimiques. Peu à peu, les espaces publics et privés tolèrent la présence du végétal sauvage. Bien sûr, il reste l’important problème des conséquences environnementales de l’agriculture intensive.
Vous ne vous adressez pas aux enfants dans votre magazine. Pourtant, la toute jeune génération gagne à plonger ses mains dans la terre ?
Nous nous intéressions à ce lectorat un temps. On ne le fait plus, car la revue se veut d’abord pratique et cherche à faire vivre les choses avant de les théoriser. C’est aux parents et aux grands-parents de partager des instants importants et d’emmener les enfants au jardin. Mon fils était là lorsque nous avons planté les fruitiers du verger: dans vingt ans, ces arbres le rattacheront à quelque chose de fondamental.
Tout le monde ne dispose pas d'un lopin de terre. L'accès au jardin peut-il devenir une source d'inégalité ?
La moitié de la population humaine vit en ville aujourd’hui. Pour faciliter le retour à la terre, des solutions existent et passent par un urbanisme créatif. On peut, par exemple, troquer les zones commerciales contre des jardins partagés, ou développer des potagers sur les toits. Tout cela me paraît motivant et moins utopique qu’il y a cinq ou dix ans.
Et si Le jardin était une invitation à la sobriété et au voyage immobile ?
Clairement. Je ne peux que vous renvoyer au sociologue Georges Balandier et à ses réflexions sur la mobilité généralisée. Il m’arrive de rencontrer des jeunes, fatigués de cette injonction permanente au voyage dans laquelle ils ont grandi. Ils se disent heureux de se poser et de s’ancrer. Du jardin à la planète, c’est justement le slogan des 4 saisons du jardin bio !
Bon pour le moral
Jardiner empêcherait de déprimer. Une étude américaine récente a montré que Mycobacterium vaccae, naturellement présente dans le sol et la terre, active la libération de sérotonine et de dopamine dans le cerveau. Ainsi, cette bactérie améliorent le système immunitaire, apportent un sentiment de bonheur et de vitalité tout en soulageant la douleur.
Retrouvez l'intégralité du dossier "le jardin fait son cinéma".
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Cet article est extrait de la Revue Salamandre
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