© Jean Chevallier

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Héron malgré lui

Le héron, un échassier haut perché

J’ai trouvé mon héron dans un arbre, un jour de rafales, en pleines giboulées. Je me suis plu à le suivre, et à souhaiter que ce soit lui, toujours le même, au fil des mois d’observation.

J’ai trouvé mon héron dans un arbre, un jour de rafales, en pleines giboulées. Je me suis plu à le suivre, et à souhaiter que ce soit lui, toujours le même, au fil des mois d’observation.

Il pleut depuis quatre jours. Une pluie cinglante. Le sol dégorge, l’étang déborde. Au-dessus des saules enchevêtrés dans l’eau brunâtre, quelques arbres décharnés ploient sous les rafales. Tout là-haut, campé sur son nid, le héron reste imperturbable. Peu importe que sa huppe lui batte la nuque comme une écharpe mal attachée. Les branches peuvent craquer, le froid peut mordre. Son œil rond et fixe se moque du déluge. L’oiseau sait qu’il ne fera pas naufrage.

héron malgré lui dessin arbre
Un héron haut perché / © Jean Chevallier

Du haut du frêne

Il est arrivé le premier, à la mi-février. Il s’est emparé de la meilleure place, tout en haut du vieux frêne : un nid énorme qu’il convoitait l’année dernière, tandis que ses occupants couvaient déjà.

Ses voisins ? Des cousins sans doute, peut-être même un frère, une sœur, un père. Des hérons sans intérêt, avec lesquels il garde une distance froide, et pas toujours polie. En tout, le grand frêne supporte trois nids, mais la colonie compte plusieurs arbres : treize familles ont adopté le coin. Une quatorzième n’y trouverait plus de place.

héron malgré lui dessin vol
Vol de héron / © Jean Chevallier

Voir venir la belle

Une foulque crie. La pluie redouble. Surgi de nulle part, un autre héron survole le bosquet. Lentement, amplement. Il tourne un moment, hésite, puis s’éloigne sans bruit. Mon héron n’a rien perdu de la scène. Il sait que bientôt il ne sera plus seul. Fébrile, il a déjà endossé sa tenue d’apparat. Ses plumes sont lustrées, son bec orange magnifique. Le message est clair : beau capitaine sur radeau bien amarré cherche tendre sirène pour amours fécondes.

Habitat groupé

La héronnière, un endroit convivial ? Certainement. Plusieurs espèces d’oiseaux n’hésitent pas à s’installer à proximité des grands échassiers, voire au cœur de leur nid. C’est le cas des étourneaux et des moineaux friquets. Ces cavernicoles se lovent volontiers dans l’entrelacs des branches.

héron malgré lui moineau friquet
Moineau friquet / © Benoît Renevey

Dans les grandes colonies de l’ouest de la France, comme au lac de Grand-Lieu, les hérons cendrés cohabitent avec d’autres échassiers : grandes aigrettes, bihoreaux, crabiers chevelus, spatules blanches et ibis sacrés. On note aussi la présence de rapaces comme le milan noir ou le faucon hobereau.

héron malgré lui Grande aigrette bihoreau milan noir
Grande aigrette (gauche), bihoreau (haut) et milan noir (bas) / © Jean-Marc Fivat

Les corbeaux freux, qui nichent aussi en colonie, ajoutent souvent leurs cris rauques à la cacophonie ambiante. Les corneilles par contre ne sont jamais les bienvenues. Il leur suffit d’une inattention des parents pour gober les œufs ou s’emparer d’un petit.

héron malgré lui Corbeau freux
Corbeau freux / © Erwan Balança

Pionnier

Au printemps, les hérons retardataires devront se contenter des moins bonnes places, mais aussi des zones de pêche médiocres et éloignées. S’il doit parcourir plus de 30 ou 40 km aller-retour pour manger, le héron préférera s’installer ailleurs. Il devra alors se faire une place dans une autre colonie ou en fonder une nouvelle.

Prudent

héron malgré lui dessin vol
Vol de héron / © Jean Chevallier

Les hérons nichent dans les arbres, hors de portée du renard ou des intrusions humaines. Les nids sont généralement construits à une hauteur de 10 à 40 mètres, à la cime des feuillus ou des conifères, ce qui facilite les allées et venues.

Quand les grands arbres font défaut, comme en Camargue, les hérons s’installent dans des buissons bas ou à même le sol. Mais par sécurité, ils choisiront alors un milieu aquatique : une roselière, une île lacustre ou une saulaie inondée.

Dans les colonies établies de longue date, on peut dénombrer plus d’une centaine de nids. La taille de la colonie est directement liée à la quantité de nourriture disponible dans les parages. Plus il y en a, plus il y aura de nids !

Comment différencier les oiseaux à longues pattes ? Dans quels milieux observer le butor étoilé, le flamant rose, la grande aigrette, le crabier chevelu? Réponse dans le Miniguide n°31: Oiseaux à longues pattes.

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Héron malgré lui

Couverture de La Salamandre n°184

Cet article est extrait de la Revue Salamandre

n° 184  Février - Mars 2008, article initialement paru sous le titre "Echassier haut perché"
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