L’ichneumon, une guêpe parasite et contorsionniste
L’ichneumon surprend par son anatomie et son mode de vie. Quand donner naissance passe par un numéro de cirque.
L’ichneumon surprend par son anatomie et son mode de vie. Quand donner naissance passe par un numéro de cirque.
Dans la forêt de pins, l’air est saturé d’un parfum de résine et de bois mort. Les vieux arbres laissent à peine passer la lumière. Au sol, un tronc se décompose avec la lenteur des êtres qui retournent à la terre. Le défunt végétal sera bientôt le théâtre d’un véritable numéro de cirque. Et la star du show répond au nom de Dolichomitus imperator. La voilà qui sort de la pénombre et se pose avec élégance sur le géant couché. Grande dame aux longues antennes, au corps élancé et aux pattes orange. Mais comment n’est-elle pas gênée par l’immense appendice qui prolonge son abdomen ?
Le numéro commence enfin. Acte I : l’artiste parcourt le tronc en le tapotant avec ses antennes. Elle avance, puis recule, tapote à nouveau, répète ces pas de danse avant de s’arrêter. Ah, elle a senti quelque chose à travers le vestige d’écorce. Acte II : le bout des antennes plaqué contre la surface du bois, la belle soulève son abdomen haut, très haut… si haut qu’elle peut pointer son interminable ovipositeur à la verticale contre le bois. Acte III : l’étrange aiguille se sépare en trois. Deux gaines protectrices se relèvent à l’arrière du corps pour libérer un stylet fin à l’extrémité dentée. Ce dernier est constitué de deux valves qui, en coulissant l’une contre l’autre dans un savant va-et-vient, permettent de percer profondément le bois. Une mécanique qui a notamment inspiré l’industrie du forage ainsi que certaines techniques de neurochirurgie !
Que diable cherche exactement cet ichneumon à la fois artiste et artisan ? Tout simplement à parasiter une larve de coléoptère qui se croyait à l’abri dans sa galerie de bois vermoulu en déposant un œuf directement sur son corps (> Aliens...). Une fois sa mission accomplie, l’insecte sur échasses rétracte son appendice et remet ses gaines en place. Accessoires remballés, rideau tiré, fin du spectacle.
Evolution diabolique ?
« Je ne puis me persuader qu’un Dieu bienfaisant et tout-puissant ait créé les ichneumons avec l’intention arrêtée de les laisser se nourrir de chenilles vivantes », écrivait Charles Darwin en 1860 dans une correspondance. Le mode de vie parasitoïde de certains de ces insectes confortait pourtant l’illustre naturaliste dans sa théorie de l’évolution. Une publication entomologique récente propose d’ailleurs de renommer les imprononçables ichneumons guêpes de Darwin.
Aliens…
Les ichneumons comptent probablement plus d’espèces que l’ensemble des vertébrés connus. Et tous sont spécialisés pour pondre sur ou dans le corps d’insectes ou d’araignées. On dit qu’ils sont parasitoïdes, c’est-à-dire qu’ils provoquent à petit feu la mort de leur hôte dévoré vivant. La larve de guêpe veille toutefois à ne pas consommer trop tôt ses organes vitaux. Après avoir émergé, elle ne laisse derrière elle qu’une carcasse vide.
… ou top-modèles
Les ichneumons font partie des premiers hyménoptères à adopter la taille de guêpe. Court ou long, ce rétrécissement entre le thorax et l’abdomen permet une grande mobilité, un atout pour pondre dans leurs victimes.
Visionnez cette incroyable vidéo de la BBC qui montre un ichneumon parasitant les chenilles de papillons dans une fourmilière.
Cet article fait partie du dossier
Mille et une guêpes
-
SciencesSciences
Les guêpes sont bien plus diversifiées qu’on ne le pense
Abonnés -
SciencesSciences
Symphytes, des guêpes … sans taille de guêpe
Abonnés -
SciencesSciences
L’ichneumon, une guêpe parasite et contorsionniste
Abonnés -
SciencesSciences
Certaines guêpes pondent leurs œufs dans des pucerons
Abonnés -
SciencesSciences
Guêpe-coucou : des couleurs incroyables
Abonnés -
SciencesSciences
Polistes gaulois, des guêpes assez pacifiques
Abonnés -
SciencesSciences
Guêpe commune, ambassadrice malgré elle
Abonnés -
SciencesSciences
Le frelon européen est aussi nocturne
Abonnés -
SciencesSciences
Fourmis de velours, d’étonnantes guêpes sans ailes
Abonnés -
SciencesSciences
Les guêpes potières et maçonnes construisent d’étranges nids
Abonnés -
SciencesSciences
10 guêpes solitaires prédatrices d’insectes
Abonnés -
ÉcologieÉcologie
Pourquoi la guêpe a-t-elle moins bonne réputation que l’abeille ?
Abonnés
Cet article est extrait de la Revue Salamandre
Catégorie
Ces produits pourraient vous intéresser
Poursuivez votre découverte
La Salamandre, c’est des revues pour toute la famille
Plongez au coeur d'une nature insolite près de chez vous
Donnez envie aux enfants d'explorer et de protéger la nature
Faites découvrir aux petits la nature de manière ludique
merci de ne pas les utiliser sans l'accord de l'auteur