Le goût des plantes aromatiques au jardin
Cultiver un potager, oui ! Mais pas sans plantes aromatiques. Lettre illustrée d’une tante jardinière à son neveu des villes.
Cultiver un potager, oui ! Mais pas sans plantes aromatiques. Lettre illustrée d’une tante jardinière à son neveu des villes.
« Mon cher Léonard, quel bonheur de recevoir ton dernier courrier ! Tes lettres ont toujours l’effet d’un rayon de soleil sur mon humeur. Je ne me sens pas isolée mais les visites sont tout de même rares. Qu’importe ! J’ai mon jardin. C’est la belle saison des tilleuls en fleur. Leur parfum suave se mêle à l’odeur fraîche et légère de la lavande. A cette époque de l’année, je passe une partie de mes journées sur le banc face à la prairie fleurie. Je ferme les yeux, m’enivre des senteurs qui se dégagent des rosiers, écoute le va-et-vient des insectes butineurs…
Bientôt, la chaleur va clouer le bec aux oiseaux. Il sera temps de cueillir les cerises. Je suis ravie d’apprendre que tu t’es mis au jardinage. Déjà enfant, quand tu venais passer tes vacances à la campagne, tu avais la main verte. Comme paraît-il de plus en plus de citadins, tu veux ton petit coin de terre pour faire pousser tomates et potirons. Je ne peux que t’encourager. Tu verras : les légumes qu’on a semés, soignés et récoltés soi-même ont une saveur incomparable. Mais je vais te donner un conseil : il faut leur offrir la compagnie de plantes aromatiques.
A gorge déployée
Menthe, lavande, mélisse, basilic : la plupart des aromatiques font partie des lamiacées. Cette famille de plantes réunit quelque 6 000 espèces. Son nom vient du grec laimos, qui signifie gorge ou gosier. Avec leur corolle caractéristique à deux lèvres, les fleurs des lamiacées ont une forme de gueule ouverte. La partie supérieure fonctionne comme casque de protection contre la pluie et le soleil, alors que la babine inférieure sert de plate-forme d’atterrissage aux insectes en quête de nectar. En plus de produire des huiles essentielles, une grande partie des lamiacées ont une tige quadrangulaire que l’on peut distinguer en la faisant rouler entre ses doigts.
Si tu vas d’abord les apprécier en cuisine pour leurs notes gourmandes, tu apprendras aussi à les cultiver pour ta santé. La plupart ont d’intéressantes propriétés médicinales.
Prends le romarin par exemple. Il était déjà présent au Moyen Age dans les jardins de curé, où le carré des aromatiques était bien fourni. En association avec le genièvre, on s’en servait pour frictionner et redonner un peu de vigueur aux personnes alitées. Si le matin, tu as de la peine à te réveiller ou que tu te sens surmené, je te conseille de caresser les branches de cet arbrisseau. Hume alors l’odeur revigorante qui enveloppe tes doigts : le romarin, qu’on surnomme encensier, est un excellent tonique en cas de fatigue.
Moi, il me rappelle l’accent du Midi et la saveur de la ratatouille. Je l’utilise également pour égayer mes plats. Non seulement cette plante apporte une note joyeuse à ma cuisine traditionnelle, mais surtout elle stimule les voies digestives et assure à mes invités une meilleure digestion de mes menus copieux. Quand tu repasseras me voir, je te ferai goûter, après le repas, à ma liqueur de romarin. J’en ai préparé ce printemps. Il faut attendre trois mois pour la déguster : elle sera bientôt prête.
Pour garantir longue vie à cette plante, tu veilleras à lui choisir un endroit abrité des courants d’air : de ses origines méditerranéennes, cette vivace a gardé une aversion pour le froid. Comme son cousin le basilic, le romarin ne supporte pas le gel. A contrario, ses feuilles en forme d’aiguille sont tout à fait adaptées aux conditions arides. Pas besoin de l’arroser, si ce n’est au moment de la plantation !
Rose bleue
Une légende raconte qu’à l’origine, les fleurs de tous les romarins, à l’image de Rosmarinus albus, étaient de couleur blanche. Avant de donner naissance à l’Enfant Jésus, la Vierge Marie aurait déposé son manteau bleu sur un buisson de romarin. C’est ce vêtement qui aurait donné sa teinte si délicate aux fleurs de l’herbe aux couronnes, allant du bleu pâle au violet clair. Et du coup gratifié la plante des surnoms de rose de Marie et de bouquet de la Vierge.
Pour la gratte-terre que je suis, une autre incontournable du jardin est la sauge. Elle fait d’ailleurs bon ménage avec le romarin. Son nom dit tout ou presque de ses vertus : Salvia vient du verbe salvare, guérir et sauver. En parcourant les livres, j’ai découvert que, dans la mythologie grecque, la sauge est associée à Zeus. Selon la légende, le roi des dieux fut élevé par la chèvre Amalthée à proximité d’une sauge. Cette plante, surnommée herbe sacrée, aurait conféré au lait du mammifère, dont se nourrissait Zeus, des pouvoirs extraordinaires. Pour ma part, je fais confiance à ce vieux dicton : Qui a de la sauge dans son jardin n’a pas besoin de médecin. La sauge officinale m’a été d’un grand secours à plusieurs reprises au cours de ma vie. J’ai pu tester ses propriétés apaisantes lors d’aphtes et de problèmes de gencives : je cueille une feuille fraîche, je la lave et je la mâchouille. Rien de plus simple.
Quand je souffre de maux de gorge, je recours à la tisane en gargarisme. Au village, il y avait autrefois un asthmatique qui soignait ses difficultés respiratoires en fumant des feuilles séchées de sauge. Je ne sais pas si ce traitement était raisonnable, mais le gaillard y trouvait un profond réconfort ! Et lorsque j’ai rencontré les premiers troubles de la ménopause, la sauge m’a aidée à lutter contre les inconfortables bouffées de chaleur. Bref, cette plante est pour moi une vraie panacée. En outre, elle est d’une beauté rare. Chaque année au début de l’été, je m’extasie devant ses grandes fleurs, d’un bleu violacé pâle. Avec le temps, les tiges de la sauge deviennent ligneuses et forment de jolis buissons. Je te conseille de la planter en bordure de ton potager. En plus de t’offrir ses bienfaits, elle t’aidera à refouler certains parasites des cultures, notamment la piéride du chou.
Je pourrais encore te faire l’éloge du thym serpolet, de la lavande, de l’origan ou de l’hysope. Chaque aromatique mérite qu’on s’y intéresse. A toi de choisir celles qui t’appellent. En échange du gîte, elles vont te rendre de nombreux services : attirer les auxiliaires, repousser les nuisibles, égayer tes plats, soigner tes petits bobos et surtout, embellir et embaumer ton jardin. Je t’embrasse. »
S’enivrer de plantes aromatiques
Censé chasser la mélancolie, le vin de sauge est réputé égayer les apéros. Dans tous les cas, il suscite l’intérêt des convives. Parmi les nombreuses recettes, voici un vin blanc glacé à la sauge, à la menthe et au miel. Effeuiller 2 branches de sauge fraîche et verser une bouteille de vin blanc doux dans une casserole. Ajouter la sauge, 2 cuillerées à soupe de miel et 2 branches de menthe fraîche. Porter le mélange à ébullition et faire frémir de rois à cinq minutes. Retirer la casserole du feu et laisser refroidir la préparation avec les plantes aromatiques une journée au réfrigérateur. Filtrer avant de servir.
Cet article est extrait de la Revue Salamandre
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