L’horticulteur Xavier Allemann a créé un jardin en harmonie avec la nature
Le maître horticulteur Xavier Allemann rêvait d’un autre jardin. Depuis 2003, il accueille les visiteurs et la vie sauvage.
Le maître horticulteur Xavier Allemann rêvait d’un autre jardin. Depuis 2003, il accueille les visiteurs et la vie sauvage.
Il existe des lieux magiques où le temps semble s’arrêter. «Lautrejardin» est de ceux-là. A l’entrée déjà, le pas ralentit devant les massifs de menthe et les fenouils qui conduisent à la vieille ferme de Cormérod. Il hésite face à l’extravagance de la verveine de Buenos Aires et se fige devant l’hôtel à insectes, meublé avec goût de briques, de buches et d’une roue de char truffée de tiges creuses. Passage obligé sous la grange, avant d’entrer pour de bon dans un jardin extraordinaire. «Ou plutôt, les jardins , corrige Xavier Allemann, le maître du lieu. Les plantes sont groupées en fonction de leurs exigences écologiques, de leur structure et de leurs couleurs au fil des saisons, à l’exemple du jardin blanc, qui est un pur bonheur pour les papillons de nuit et les chauves-souris.»
Un gamin des talus
Si les hôtes du jardin blanc resteront secrets, les syrphes et les papillons diurnes ne cachent pas au visiteur leur intérêt pour les différents massifs. Comme ceux des asters qui fleurissent tout l’automne et dont Xavier possède une belle collection. Sa passion du végétal ne date pas d’hier. «Gamin déjà, je faisais plein de boutures et de semis dans ma chambre» , se souvient le Jurassien.
Sa formation d’horticulteur en poche, Xavier Allemann travaille pendant dix ans, dont cinq à Zurich, comme acheteur dans une grande chaîne de jardinerie. Amoureux de la diversité, il s’emploie à varier au maximum les assortiments, en privilégiant la qualité, le local, mais aussi l’arbuste indigène, une révolution à l’époque. En 1999, la visite du jardin botanique de Zurich le marque profondément: «Les végétaux y sont associés en milieux de vie, proches de l’état naturel. La plante n’est plus simplement décorative, elle a un rôle à jouer au fil des saisons, pour nourrir ou abriter les insectes, les oiseaux et tous les hôtes insoupçonnés du jardin.»
Du sauvage en pot
Xavier décide alors de créer en Suisse romande une pépinière pas comme les autres, vouée à promouvoir la plante vivace et la diversité. Restait à trouver un site. Ce sera Cormérod, village fribourgeois situé à 8 km d’Avenches, «car nous avons été charmés par le génie du lieu» . Et ce sera lautrejardin, «parce que ce nom offre d’emblée une alternative aux tagètes et aux thuyas». Inaugurée en 2004, la pépinière est connue loin à la ronde. Plus qu’une jardinerie, c’est un pôle de rencontre lors de journées thématiques, et un lieu de balade où l’on peut se faire une idée de l’allure et du volume que prendra à maturité le végétal, avant de choisir ses petits pots dans la pépinière accolée au jardin. Y sont proposées plus de 800 variétés de plantes vivaces, cultivées sans tourbe et sans produits phytosanitaires: «Je les ai choisies selon leur intérêt pour les butineurs et les oiseaux, mais aussi pour leur beauté aux différentes saisons», insiste notre jardinier.
L’an dernier, Xavier franchit une étape de plus en osant la plante indigène: «Mes vivaces horticoles attirent surtout les insectes adultes, tandis que les plantes sauvages nourrissent aussi leurs larves, ce qui est un plus pour les papillons.» Valériane officinale, scabieuse jaune, benoîte des montagnes, asarum ou encore géranium sanguin complètent aujourd’hui l’assortiment. Pleines de charme, elles ont aussi tout pour séduire le jardinier qui prend le temps de contempler la vie autour de lui.
Xavier Allemann
- 1961: naissance à Délémont (JU).
- 1995: maîtrise d’horticulture à Morges-Marcellin.
- 2004: ouvre sa pépinière à Cormérod.
- 2009: crée et préside l’antenne romande de l’Association suisse des amis des plantes vivaces (ASPV).
- 2011: adhésion de lautrejardin à la Charte des Jardins.
Des clés pour agir
Un jardin naturaliste en 5 étapes
- Connaître l’exposition et la qualité du sol, s’imprégner du génie du lieu. Eviter par exemple de vouloir créer un jardin sec dans un sol qui n'est pas drainé.
- Choisir les plantes en fonction des milieux de vie (jardin d’ombre, de gravier...), de leur structure (taille, volume, aspect en hiver) et de leur intérêt pour la faune sauvage (plantes indigènes ou horticoles proches du type sauvage). Equilibrer le nombre de plantes solitaires, de petits groupes et d’espèces couvre-sol.
- Installer les végétaux en automne (septembre à novembre) ou au printemps (mars-avril). Respecter les distances de plantations recommandées.
- Arroser 2-3 fois après la mise en place.
- Observer et suivre la croissance des plantes. Un jardin de vivaces atteint sa maturité au bout de quatre à cinq ans. Dans l'intervalle, semer quelques annuelles entre les vivaces
Un entretien minimal
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Bannir l’usage de produits phytosanitaires.
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Faire preuve de tolérance à l’égard des insectes. Dans un jardin diversifié, un équilibre entre prédateurs et insectes phytophages s’établit promptement.
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Désherber manuellement (jamais de toile plastique couvre-sol !). Pailler éventuellement avec du broyat de branches.
- En hiver, laisser des plantes sèches pour les insectes hivernants et les oiseaux. Ne tailler que les plantes moins intéressantes, afin de recréer un équilibre visuel.
Un bon choix de mellifères
Quatre familles particulièrement attractives pour les insectes : les apiacées (carotte sauvage, fenouil, angélique), les lamiacées (sauge, nepeta, menthe), les astéracées (chardon, marguerite, aster) et les euphorbes.
Où trouver des plantes indigènes
Simple et pas cher : prélever des graines dans la nature au cours de l’été. Semer en pots ou directement dans les plates-bandes en automne ou au printemps suivant. Quelques pépinières et semenciers proposent des espèces indigènes :
En Suisse:
-
Lautrejardin à Cormérod (FR), Programme des cours, journées thématiques.
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Patricia Willi, à Eschenbach (BE) est spécialiste des vivaces indigènes. Envois possibles par poste. wildstauden.ch
-
Kokopelli et Sativa proposent dans leurs catalogues de semences biologiques quelques vivaces, bisannuelles et annuelles indigènes.
- Enfin, quelques bonnes adresses sur plantes-sauvages.ch, l’infocentre pour la promotion des plantes sauvages indigènes.
En France:
- Le Jardin de Sauveterre, dans la Creuse (23), cultive 120 espèces, vendues principalement en sachets de graines (+ 8 espèces en plants racines nues); certification bio.
- Le jardin du naturaliste: dans l’Oise (60), pépinière spécialisée dans la plante sauvage.
- Kokopelli et biau germe proposent dans leurs catalogues de semences biologiques quelques vivaces, bisannuelles et annuelles indigènes.
Cet article est extrait de la Revue Salamandre
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