Comment le nez fonctionne-t-il ?
Cinquième sens, cinquième roue du char ? Souvent négligé, l’odorat mérite pourtant qu’on s’intéresse à son fonctionnement. Plongée nez devant dans ce monde de récepteurs, de stimuli olfactifs et de muqueuse.
Cinquième sens, cinquième roue du char ? Souvent négligé, l’odorat mérite pourtant qu’on s’intéresse à son fonctionnement. Plongée nez devant dans ce monde de récepteurs, de stimuli olfactifs et de muqueuse.
L’être humain dispose de 5 cm2 de muqueuse olfactive. Cette surface est tapissée de cils équipés de 300 sortes de protéines. Les substances qui se fixent sur ces récepteurs déclenchent des signaux nerveux transmis au cerveau. Par ce biais, l’homme est capable de sentir 10’000 molécules connues sur plus de… 9 millions ! Il peut aussi distinguer des substances très proches. Un exemple : la carvone possède deux variantes, symétriques l’une de l’autre comme le sont la main gauche et la main droite. Selon son sens, la molécule évoquera soit la menthe, soit le carvi. Certaines substances agissent aussi sur d’autres récepteurs que ceux de l’odorat : le menthol stimule des capteurs du froid, d’où la sensation de fraîcheur qui lui est associée. La moutarde, elle, excite les récepteurs de la douleur : elle pique.
La sensibilité olfactive individuelle est variable et en moyenne meilleure chez les femmes que chez les hommes. Chacun réagit différemment selon les substances. Un exemple : une personne sur deux seulement est sensible à l’androsténone, une molécule présente dans la sueur humaine et le parfum de truffe. Plus étonnant encore : certains lui trouvent des accents doux et floraux, d’autres ue odeur d’urine. Ces différences semblent liées à des disparités génétiques et pourraient expliquer des aversions ou attirances très contrastées pour des saveurs telles que la coriandre.
Le nez a le pouvoir de détecter de très faibles quantités de matière dans l’air. Par contre il sature rapidement. Chaque substance possède un seuil de perception minimal, et l’augmentation de sa concentration peut ensuite être perçue de façon plus ou moins précise. La vanilline est ainsi décelable en très faible quantité, mais son augmentation n’a guère d’effet sur la puissance du parfum. Certaines substances sont nauséabondes à forte concentration mais agréables une fois diluées. Témoin l’indole, présent dans le parfum du jasmin, qui passe d’une forte odeur fécale à une agréable note florale.
L’odorat est le seul de nos cinq sens relié directement avec le système limbique, siège des émotions et de la mémoire. Cette connexion expliquerait le caractère privilégié des parfums comme vecteur d’émotion et la très bonne persistance des souvenirs captés par notre nez. Les senteurs ont aussi des effets sur la capacité d’attention, la mémorisation, l’humeur, la confiance ou l’appréciation. Mais il est difficile de savoir à quel point une performance provient des vertus présupposées ou d’un effet biologique direct. Ce dernier n’est probablement pas négligeable : chez les souris de laboratoire comme chez l’humain, le linalol, composant de l’essence de lavande, réduit le stress. L’influence des parfums peut même être subliminale : à des concentrations trop faibles pour être perçue, une odeur peut générer une sensation. Donner faim par exemple.
L’homme sécrète environ 300 composés odorants, principalement liés à la transpiration. La sueur n’est pas malodorante : c’est sa transformation par des bactéries qui entraîne le dégagement d’ammoniac, de sulfure d’hydrogène et d’autres substances peu engageantes. Déjà fonctionnel avant la naissance, l’odorat permet au nouveau-né de reconnaître sa mère. Enfin, côté sexe et amour, de nombreux fantasmes sont générés par le truchement du nez. Pourtant, l’organe voméronasal — centre nerveux jouant un rôle dans la reproduction chez de nombreux mammifères — n’est pas fonctionnel chez l’homme. La transpiration contiendrait malgré tout divers composants capables d’affecter l’humeur ou l’attirance d’autres personnes.
Les narines participent au repérage dans l’espace, chacune permettant d’explorer une direction différente de notre environnement. Il semble qu’on sente globalement mieux par la narine gauche, tandis que les effluves agréables seraient plus facilement perçus à droite. Si deux émanations différentes sont présentées à chacune des narines, le cerveau ne les mélange pas mais alterne chacune des perceptions. L’odorat de l’homme est souvent considéré comme médiocre, or des expériences contredisent cette affirmation. Une fois entraînés, nous devrions pouvoir suivre une piste presque comme un fin limier. Et pourtant, notre muqueuse olfactive est 20 fois plus petite que celle du chien.
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Cet article est extrait de la Revue Salamandre
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