Robert, le paon et les autres papillons qui aiment l’ortie
La petite tortue n’est pas seule à se doper à l’ortie. L’urticante nourrit les chenilles de plusieurs papillons, tous de la même famille.
La petite tortue n’est pas seule à se doper à l’ortie. L’urticante nourrit les chenilles de plusieurs papillons, tous de la même famille.
Œil de paon
Au repos, c’est une vulgaire feuille morte. Il faut qu’un danger le guette pour que le paon-du-jour déploie ses ailes. Et là, ce sont 4 yeux qui vous fixent. Plumes de paon ou yeux de chouette, l’effet est garanti sur les prédateurs. Il paraît que le papillon émet aussi un bruit en frottant ses ailes. Une autre façon d’intimider l’ennemi ? Le paon-du-jour papillonne dans des endroits variés : prairies humides, coteaux secs ou jardins.
Fin gourmet, il recherche des nectars aussi subtils que ceux du cirse des marais et des centaurées. Il s’arrête aussi sur le buddléia des parcs et jardins, ou arbre aux papillons. Mais pour déposer ses œufs, il n’y a que l’ortie qui fasse l’affaire. Et encore ! Il lui faut tout un massif installé dans un endroit frais et humide.
Robert-le-diable
De loin, on dirait une fiente insignifiante maculée de blanc. A y regarder de plus près, il semble que la fiente se tortille sur une feuille d’ortie. Approchons encore ! Ça n’a plus rien d’une masse informe. Voici la chenille de robert-le-diable, impossible à confondre grâce à sa longue tache blanche. Au contraire de la petite tortue, robert est un papillon solitaire à tous les stades, de l’œuf à l’adulte. Le mâle vole aux abords des lisières. C’est un malin qui se bat comme un beau diable pour échapper aux oiseaux et défie le filet des entomologistes, d’où le nom qu’ils lui ont donné. Il n’arrête de voler que pour se percher sur une haute branche, hors d’atteinte.
Si un rival audacieux s’aventure sur son territoire, robert l’entraînera vers le ciel dans une mêlée tournoyante. S’agit-il d’une femelle ? Dans ce cas, la danse endiablée se terminera par un accouplement sur lit d’orties.
Cartes géographiques
Dans le fossé, les orties ont belle allure. Un papillon orange et noir vient de s’envoler. Voici la carte géographique, ainsi nommée à cause de la grille dessinée au revers de ses ailes. C’est le seul de nos papillons qui ponde ses œufs en chapelet à l’envers des feuilles d’ortie.
Début juillet : les chrysalides sont sur le point de délivrer leurs prisonniers. L’une d’elles se déchire pour laisser poindre une tête poilue. Le papillon s’extirpe, puis déplie doucement ses ailes chiffonnées. Surprise ! elles ne sont pas orange mais noires, traversées par une bande blanche et bordées d’un fin liseré orange.
Chez les cartes géographiques, c’est la saison qui décide de la couleur. Les chenilles exposées aux longs jours de l’été se transforment en papillons noirs. Leur propre descendance passera les interminables nuit d’hiver enfermée dans des chrysalides. Au printemps, celles-ci donneront des spécimens en livrée orange.
Les vulcains
Avril, printemps, renaissance. Curieusement, les premiers vulcains de l’année ont les ailes déjà décolorées et abîmées. C’est qu’ils en ont vu, du pays ! Parmi ceux qui sont partis du Maroc et ont survolé le détroit de Gibraltar, certains ont longé les côtes atlantiques portugaise et française pour continuer jusqu’en Islande ; quant à ceux qui arrivent chez nous, ils ont gagné la Méditerranée et remonté la vallée du Rhône. Tous ne s’arrêtent pas : les plus hardis poursuivent leur migration jusqu’en Scandinavie.
Une fois arrivées à destination, les femelles chercheront un massif d’orties au soleil, y pondront leurs œufs, un à un. Puis mourront. A l’automne, leur descendance fera le voyage du retour jusqu’au bord de la Méditerranée. Ces êtres délicats n’hésitent pas à franchir villes, mers et montagne pour offrir toute l’année à leurs chenilles des orties juteuses et protectrices.
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Cet article est extrait de la Revue Salamandre
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