6 exemples de montagnes qui s’effondrent
Sous les coups de l'érosion et de la gravité, les montagnes changent de visage. Voici six histoires de massifs creusés par le temps.
Sous les coups de l'érosion et de la gravité, les montagnes changent de visage. Voici six histoires de massifs creusés par le temps.
Un volcan recyclé
Voici un scoop : il y a des volcans dans les Pyrénées. Ou plutôt de très anciens volcans. Le pic du Midi d’Ossau, sommet emblématique de la chaîne franco-espagnole, est un vestige du volcanisme qui secoua la région bien avant le soulèvement des Pyrénées. Surgi il y a 278 millions d’années, le volcan d’Ossau a, bien plus tard, vu son toit s’effondrer. Ce qui a entraîné la formation d’une caldeira, une vaste dépression circulaire. Avec la formation des Pyrénées sous l’effet de la collision entre les plaques ibériques et européennes il y a 40 millions d’années, la caldeira s’est soulevée et a permis la constitution du sommet actuel, dont la forme très particulière lui vaut sa célébrité locale. De nombreuses roches volcaniques sont visibles depuis les sentiers qui parcourent le pic d’Ossau, dont un bloc de rhyolite. Une roche qui se forme à partir du refroidissement d’un magma visqueux.
Le bout du monde
Le bout du monde est parfois au pas de la porte. Dans le Jura, les reculées, des vallées en cul-de-sac aux parois abruptes, sont surnommées bout du monde. La plus belle reculée est sans doute celle de Baume-les-Messieurs. Depuis 20 millions d’années, l’eau entaille le plateau calcaire du Jura en suivant des failles formées par les mouvements tectoniques. De nos jours, la reculée continue à se creuser vers l’amont. Dans le cirque qui ferme l’extrémité de la gorge, une rivière surgit d’un dédale de cavités souterraines. L’érosion due au gel et à l’eau forme des grottes qui s’agrandissent puis finissent par s’ébouler, élargissant peu à peu le cirque.
Canyoning préhistorique
Il n’y avait pas encore d’humains dans la vallée de Flims, dans les Grisons, quand un gigantesque éboulement s’est produit, il y a plus de 9 000 ans. Les Alpes étaient recouvertes par les immenses glaciers du Quaternaire, qui entamaient alors leur recul sous l’effet du réchauffement du climat. C’est le retrait d’une énorme masse de glace, dans cette vallée où coule le Rhin, qui est à l’origine de l’effondrement d’au moins… 15 milliards de m3 de roches. Un volume exceptionnel. Modelés par la langue de glace, les versants de la montagne sont devenus instables quand le glacier s’est retiré. De plus, cette région est caractérisée par une fragilité tectonique : avant même le retrait glaciaire, les roches étaient fragilisées par de nombreuses failles. Depuis cette avalanche géante, le fleuve a creusé l’amas d’éboulis pour former le spectaculaire canyon de la Ruinaulta.
Chaos au Moyen Âge
C’est le plus important éboulement dans les Alpes de mémoire d’humain. Dans la nuit du 24 au 25 novembre 1248, dans le massif de la Chartreuse, à proximité de Chambéry, un pan de la face nord du mont Granier s’effondre, provoquant un gigantesque glissement de terrain de 500 millions de m3. Plusieurs villages sont rasés, entre 1 000 et 2 000 personnes périssent dans la catastrophe. La cause de cet éboulement est encore débattue, mais une hypothèse se dégage. Entaillée par de nombreuses grottes creusées par l’eau dans son calcaire, la montagne est fragile. En raison de pluies abondantes, un morceau de la corniche sommitale s’est détaché. Par une suite de réactions en cascade impliquant les terrains argileux gorgés d’eau au pied de la paroi, des coulées de boue ont été générées et un pan entier de la falaise s’est effondré. .
Dégel destructeur
Dans la vallée de Chamonix, la face ouest des Drus, d’une proéminence de 1 000 m, est un mythe pour les alpinistes. L’un des meilleurs d’entre eux, Walter Bonatti, y avait ouvert une voie légendaire en 1955. Elle a disparu lors d’un effondrement qui a noyé la vallée dans la poussière en juin 2005. Plus de 260 000 m3 de roches se sont détachés, rabotant le relief de la face. Forteresse de granit, les Drus sont déstabilisés par le retrait du pergélisol, les sols gelés en permanence qui cimentent entre eux les blocs en haute montagne. Un nouveau pan de 100 m de haut s’est écroulé en septembre 2011.
Un piz très surveillé
C’est une épée de Damoclès qui est suspendue au-dessus du village de Brienz/Brizauls dans le canton des Grisons. Depuis des centaines d’années, tout un versant du piz Linard, le sommet qui surplombe la commune, est en mouvement à cause de l’érosion. Mais l’instabilité du secteur s’est accentuée ces dernières années. Entre le 9 et le 12 mai 2023, les 84 habitants et le bétail sont évacués de Brienz. Le suivi scientifique du site indique alors une forte accélération de l’Insel, l’énorme masse rocheuse instable. Un mois plus tard, le 15 juin vers minuit, 1,2 million de m3 de roches s’écroulent en quatre à cinq minutes, formant une masse de 15 m de hauteur qui stoppe sa course à quelques mètres du village. Aucune victime n’est à déplorer et les villageois ont pu regagner leurs logements le 4 juillet 2023. La montagne est toujours sous haute surveillance.
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Cet article est extrait de la Revue Salamandre
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