Turritopsis dohrnii, la méduse qui retombe en enfance
Comme dans le livre qui l'a fait connaître, la méduse Turritopsis dohrnii retombe en enfance quand ça l'arrange. Ou lorsque la réalité rejoint la fiction.
Comme dans le livre qui l'a fait connaître, la méduse Turritopsis dohrnii retombe en enfance quand ça l'arrange. Ou lorsque la réalité rejoint la fiction.
Une fois n'est pas coutume, les écrivains n'ont pas eu à produire de gros efforts d'imagination en vue d'attribuer des pouvoirs extraordinaires à Turritopsis dohrnii. Cette petite méduse de 4,5 mm de diamètre a tout pour faire rêver l'humanité : la capacité de renverser son cycle de vie plusieurs fois de suite, comme si une grenouille redevenait têtard. Quelle meilleure manière de déjouer la mort ? Un romancier japonais a eu l'idée de faire avaler à son héroïne humaine un élixir de Jouvence tiré de cet animal afin de ficeler son intrigue. Cette histoire a ensuite été reprise à toutes les sauces, conférant à Turritopsis une certaine notoriété. Les prouesses de cette petite bête répandue en mer Méditerranée ont été découvertes par accident dans un laboratoire italien vers 1990. Un étudiant qui avait oublié un spécimen adulte sur une table avant de partir en week-end a été surpris de retrouver à la place une sorte de petite anémone de mer. Il s'agissait en fait d'un polype asexué, soit le premier stade de développement de la plupart des méduses. Stressée et affamée, la bestiole avait rajeuni au lieu de se laisser mourir. Cette faculté à revenir en arrière histoire de repartir de plus belle lorsque l'environnement devient plus favorable est commune à de nombreuses méduses. Mais elles ne peuvent réaliser cet exploit que durant leur petite enfance, alors que Turritopsis garde ce pouvoir et peut ainsi théoriquement jouer au yo-yo indéfiniment. Outre l'immortalité, pourquoi l'étonnante méduse s'amuse-t-elle à retomber en enfance ? Pour multiplier ses chances de reproduction, bien sûr ! Car engendrer une descendance est un processus compliqué chez cette étrange créature. A l'âge adulte, elle se reproduit de manière sexuée en libérant des gamètes dans la mer. D'un œuf fertilisé naît alors une larve qui s'accroche aux fonds marins, avant de se transformer en polype. Puis celui-ci se met à bourgeonner et à produire de façon clonale d'autres polypes, formant ainsi des colonies. De ces colonies surgissent ensuite par bourgeonnement quantité de petites méduses qui s'en détachent et grandissent.
Pendant ce temps-là, la mère de tout ce petit monde, au lieu de passer l'arme à gauche, retourne elle aussi au fond de l'eau où elle rajeunit jusqu'à redevenir un polype capable de se cloner. C'est ce processus, appelé transdifférenciation, qui intéresse particulièrement les chercheurs. Comment des cellules différenciées, avec un rôle précis dans le corps de la méduse, peuvent-elles subitement perdre cette spécialisation, avant d'acquérir de nouvelles fonctions lorsque la vapeur s'inverse à nouveau ? Décidément, cette méduse surdouée renferme encore bien des mystères.
L'abeille rajeunit son cerveau
L'abeille domestique aurait la faculté de faire rajeunir son cerveau lorsque la survie de la colonie est en jeu. D'ordinaire, la vie d'une ouvrière s'étend sur cinq à six semaines. Durant cette période, elle occupe successivement différentes fonctions : ménagère, nourrice, cirière pour la fabrication des alvéoles, gardienne de la ruche, ventileuse et enfin butineuse. C'est là que le vieillissement s'accélère. Ses ailes s'usent, elle perd ses poils et surtout ses fonctions cérébrales et finit par mourir. Mais si l'on retire d'un coup toutes les nourrices d'une ruche, une partie des butineuses stoppe immédiatement ses activités pour retourner pouponner. En retrouvant leur premier poste, les insectes concernés restaurent par la même occasion les capacités cognitives perdues avec l'âge. Comment est-ce possible ? Des analyses ont montré que le cerveau des butineuses redevenues nourrices contient des protéines qui les protègent du stress cellulaire et des maladies neurodégénératives.
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Cet article est extrait de la Revue Salamandre
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