Un cirque de tarins
Attendue par les amoureux des oiseaux, la troupe des tarins fait escale dans les aulnes. Entrée libre pour un spectacle acrobatique.
Attendue par les amoureux des oiseaux, la troupe des tarins fait escale dans les aulnes. Entrée libre pour un spectacle acrobatique.
De vrais artistes. Un peu comme ces musiciens de rue qui vivent à la journée, tributaires de leur maigre chapeau, se déplaçant d’une ville à l’autre à la recherche du succès. Ainsi pourraient être décrits les tarins, des oiseaux forains amoureux des aulnes.
Absents jusqu’à hier, les voici ce matin animer comme par enchantement un bosquet le long de la rivière somnolente. Loin des spectacles glorieux de l’Europe de l’Est où ces passereaux se rassemblent par milliers, ici les troupes de tarins ne comptent tout au plus que quelques centaines d’individus. Mais n’est-ce pas dans les plus petits théâtres que l’art s’exprime sous sa forme la plus authentique et élémentaire? Rendez-vous donc sur la rive! Et pour une fois, nul besoin de jumelles.
Oubliez le chapiteau, le cirque des tarins n’en possède pas. Sans vous attendre à une fanfare, tendez l’oreille pour repérer leurs cris métalliques. Et alors peut-être les verrez-vous, ces feuilles canari tremblant sur les arbres dénudés malgré l’absence de vent. Et si subitement elles s’envolent en un tourbillon désordonné, vous y êtes. Bienvenue au cabaret des aulnes!
Quel manège, ces saltimbanques à plumes. Avec une adresse à rendre jalouse une mésange, ils défient la gravité suspendus la tête en bas aux extrémités des branches. Leur bec à la fois pointu et aplati sur les côtés est profilé pour décortiquer les cônes miniatures des aulnes. Et pas de panique, cher public, en cas de perte d’équilibre ou de cassure du perchoir, les cascadeurs transforment d’un coup d’aile leur chute en élégant salto.
Abandonnez votre peur d’être appelés sur scène et rapprochez-vous. Totalement absorbés par leur repas en l’air, les oiseaux se laissent souvent observer à quelques mètres de distance à peine. De temps à autre, un acrobate quitte le branchage et vient picorer devant vos pieds. Entre deux graines, c’est parfois au tour d’un gravillon d’être gobé. Est-il taré d’avaler des cailloux? Bien sûr que non. Ils font office de meules et servent à broyer les graines dans le gésier, comme le vieux moulin un peu plus bas sur la berge...
Avec l’arrivée du printemps, les tarins trahissent leur nom. Ils désertent les aulnes pour se diriger vers les forêts de conifères en montagne ou au nord de l’Europe. L’heure est aux amours.
Après tant de vagabondages, les artistes ambulants deviennent des parents très réservés. D’une année à l’autre, leur présence fluctue selon la production de graines d’épicéas et de sapins. Lorsque la nourriture abonde, plusieurs couples peuvent nicher les uns à côté des autres. La femelle entame alors dès le mois de février la construction du nid, une sorte de petite coupelle profonde composée de brindilles, lichens et mousses. D’après une légende germanique, le tarin y déposerait une petite pierre magique qui le rendrait ainsi invisible. Qui? Peut-être l’oiseau, peut-être le nid. Mystère. On disait que quiconque entre en possession de ce talisman ou d’un œuf de tarin aurait le même talent voire obtiendrait le pouvoir de changer d’aspect. Imperturbable, le tarin construit son nid très discrètement, loin des croyances infondées et des mains illégalement ravisseuses.
Nom d’oiseau
C’est en hiver que le tarin des aulnes porte le mieux son nom. On peut alors fréquemment l’observer le long des rivières et des lacs où vit l’arbre dont il affectionne tant les graines. Son abondance au bord de l’eau n’est pas constante mais elle dépend de la disponibilité de nourriture. Ainsi, les années où la fructification des aulnes est mauvaise dans le nord de l’Europe, des vagues de tarins affamés envahissent le reste du continent jusqu’en Espagne.
Régurgiter son respect
Le tarin passe le plus clair de son temps à se nourrir, tout en s’accordant de courtes pauses pour se toiletter. En hiver, son plat du jour comprend des fruits d’aulnes, des chatons de bouleaux et de saules et des bourgeons divers. Il arrive parfois que des individus donnent la becquée à leurs confrères de même sexe. D’après les ornithologues, ce sont surtout les dominants qui reçoivent régulièrement de la nourriture régurgitée de la part des oiseaux de rang inférieur. Ce rituel particulier renforcerait la hiérarchie et la cohésion du groupe.
Langue d’amour
Chez le tarin des aulnes, la formation des couples débute souvent au cœur de l’hiver. Les partenaires se rapprochent de plus en plus tout en errant encore en groupe. Le mâle tente d’impressionner une femelle par ses vols papillonnants et son chant riche de gazouillis. Avec le temps, chaque couple développe un cri de contact qui lui est propre. Les deux partenaires s’imitent réciproquement jusqu’à accorder parfaitement leurs appels et se reconnaître à distance.
Vous aussi obsersez-les. Retrouvez 3 conseils pour observer les tarins des aulnes.
Cet article est extrait de la Revue Salamandre
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